Vieux gréements, une flottille en évolution
Alors que Brest 2016 vient de fermer ses portes, je profite de l’occasion pour partager avec vous ma réflexion sur l’évolution du milieu des vieux gréements. Depuis l’effervescence des années 1990, les projets ont changé : plus gros, moins nombreux, plus historique…
Du bateau de travail à la reconstitution historique
La prise de conscience du patrimoine maritime en France dans les années 1990 s’est nourrie des actions de la revue Chasse-Marée et notamment du concours « Bateaux des Côtes de France » en 1992. Le magazine propose alors à chaque port français de lancer la reconstruction ou la restauration d’un bateau emblématique de sa région. On voit ainsi fleurir les voiliers de travail, utilisés à la pêche ou au transport de marchandise, voire les deux, comme le Grand Léjon, vainqueur du concours. 80 projets sont menés à terme pour l’occasion. On y trouve également quelques navires de guerre comme le Renard du corsaire Surcouf de Saint-Malo ou la goélette Recouvrance pour la ville de Brest. Ils ne représentent alors qu’une petite partie des constructions. L’objectif est principalement la conservation des traditions et du savoir-faire proches, de la fin du XIXème et du début du XXème siècle.
On note dans les dernières années une évolution dans le type de bateau lancé. L’approche tient désormais plus de celle de l’historien, avec un travail sur des archives anciennes, voire des fouilles. L‘Hermione, vaisseau de la Marine Royale du XVIIIème est évidemment le plus emblématique. On peut également citer Gyptis, construite par le laboratoire CNRS de Marseille sur la base d’une épave phénicienne retrouvée lors de fouilles pour un parking de la cité phocéenne.
Le difficile équilibre de financement
A l’heure où les financements, tant publics que privés, sont rares, nombre de bateaux peinent à équilibrer leurs budgets d’exploitation. Principalement armés par des associations, les voiliers des années 90 bénéficient de subventions en diminution. 30 ans après, les fondateurs commencent à disparaitre et il faut séduire de nouveaux bénévoles pour permettre le bon fonctionnement de ces structures.
Les nouveaux projets cherchent donc à trouver des mécènes privés. Pour cela, le type de bateau reconstruit évolue. Les grandes unités séduisent grâce à de meilleures retombées d’image. On voit par exemple des marques de luxe s’associer à l’Hermione. Pour autant, le modèle d’exploitation reste hasardeux et l’association cherche toujours des partenaires pour équilibrer les budgets. Les armateurs professionnels rencontrent également des difficultés, à l’image d’Etoile Marine, récemment repris ou de l’ancien armement Gouélia qui a tout simplement disparu.
Le classement comme moyen de survie
Afin de s’assurer des financements, de nombreux bateaux, originaux ou restaurés, constituent des dossiers afin de bénéficier d’un classement comme Monument Historique ou Bateau d’Intérêt Patrimonial. Ces statuts permettent de mener les travaux d’entretien nécessaires. Face à la baisse des dotations publiques, cette solution ne peut néanmoins suffire à sauver tous les bateaux existants.
Nombreux sont les bateaux du patrimoine maritime. Après les reconstitutions des années 90 /2000, le nouveau défi est la conservation de ces unités. Comment motiver mécènes et bénévoles ? Peut-on entretenir un vaisseau comme l’Hermione sans soutien public ? Doit-on se limiter à des voiliers plus modestes ? Telles sont les nouvelles questions. Une chose est sûre, lors des rassemblements comme Brest, les « petits » ont besoin de nous, visiteurs, pour les soutenir et les faire vivre. Avis aux lecteurs !
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