Faire un tabac, question de météo
Faire un tabac.. Contrairement aux apparences, l’expression relève plus du ministère de la Marine que de celui de la santé ou de la loi Evin !
Du pugilat au coup de tabac
Coup de tabac et plante à fumer n’ont rien de commun hormis l’orthographe. Tabac dérive ici du dialect occitan dans lequel « tabassar » signifie donner des coups. L’onomatopée ‘tab’, représentant le bruit du choc, en est à l’origine. Attesté depuis le XIIIème siècle, il a produit le verbe tabasser. Son déverbal tabas a été déformé en tabac avec le développement du tabagisme. Le jeu entre les deux significations a inspiré les auteurs classiques à l’image de Molière dans Dom Juan :
Quoi que puisse dire Aristote, et toute la Philosophie, il n’est rien d’égal au Tabac, c’est la passion des honnestes gens; et qui vit sans Tabac, n’est pas digne de vivre; non seulement il réjoüit, et purge les cerveaux humains; mais encore il instruit les âmes à la vertu, et l’on apprend avec luy à devenir honneste homme. Ne voyez-vous pas bien dès qu’on en prend, de quelle manière obligeante on en use avec tout le monde, et comme on est ravy d’en donner, à droit et à gauche, par tout où l’on se trouve? On n’attend pas mesme qu’on en demande, et l’on court au devant du souhait des gens: tant il est vray, que le Tabac inspire des sentiments d’honneur, et de vertu, à tous ceux qui en prennent.
Molière, “Dom juan” (Acte I, scène première – SGANARELLE, GUSMAN. Sganarelle tenant une Tabatiere)
Le tabac, synonyme de fureur, de violence et de bruit est attesté dans l’expression maritime coup de tabac depuis le XIXème siècle. Dans le sud de la France, il désigne un phénomène courant en Méditerranée : la tempête soudaine et très violente. Il a été popularisé dans l’ensemble de la France durant la Ière guerre mondiale. Le CNRTL le classe comme argot de la guerre, depuis 1914.
De la mer à la scène
L’image du coup de tabac est associé au bruit et au tonnerre. C’est ainsi que les tonnerres d’applaudissement ont évoqué le vacarme de la tempête au public de 1900. « Avoir un tabac » puis « faire un tabac » sont alors devenus synonymes de succès dans le monde du spectacle. L’expression, aujourd’hui popularisée, a perdu toute référence à la violence ou à la mer. Néanmoins, lorsque Petit Bateau fait un tabac avec sa dernière marinière, c’est bien le succès et non la tempête qui est en vue!
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